Les espaces urbains des pays du Sud sont en constante expansion sous le jeu de la croissance démographique (naturelle et migratoire) et reconversion par recomposition interne. Ces évolutions suscitent régulièrement des luttes sociales qui expriment les rapports de force au sein des villes. Mais ces luttes sociales ne sont pas moins intenses dans les nouveaux espaces urbains, le Sud global accueillant la plupart des projets de villes nouvelles actuels. À travers l’exemple d’Amaravati, la nouvelle capitale de l’Andhra Pradesh en Inde du Sud, nous voudrions explorer la multiplicité et la complexité des luttes sociales qui accompagnent la création ex-nihilo de cette ville.
Dans un premier temps de juin 2014 à fin 2018, une partie de la population villageoise vivant dans l’espace du projet (200 km²), s’y est opposée par tous les moyens (manifestations, pétitions en justice). Puis lorsque qu’en juin 2019, le projet a été arrêté, d’autres groupes sociaux se sont soulevés pour qu’il soit maintenu et aboutisse avec la même opiniâtreté. Nous sommes donc en présence d’un pouvoir politique démocratique qui se voit contesté par des groupes sociaux structurés. Ce renversement de situation illustre la complexité des rapports de force dans un espace urbain en construction. Encore ne faut-il pas oublier les classes sociales silencieuses qui ne participent pas aux luttes politiques, souvent les plus pauvres. Leur contestation peut prendre d’autres formes tout aussi essentielles à la fabrique urbaine.
Grâce à des travaux de terrain, nous avons pu analyser comment les gouvernements successifs d’Andhra Pradesh négocient la construction de leur nouvelle capitale. Seuls les propriétaires fonciers peuvent tirer partie du modèle spéculatif voulu à Amaravati. Cette situation de production d’une ville à neuf démontre que le droit à la ville demeure une conquête collective soumise aux ambitions de groupes sociaux concurrents.
Mots clés : capitale|droit à la ville|luttes sociales|coercition
A104177EL