Pour une approche queer de l'espace
Jérôme LAGEISTE, Université d'Artois, France
Corinne LUXEMBOURG, Ecole Nationale Supérieure d'Architecture - Paris-La Villette, France
La pensée queer théorise un savoir intersectionnel, visant une critique de l’hétéronormativité, et des normes sexuelles participant de l’organisation de la société. Elle interroge la forte proximité des normes sexuelles avec le capitalisme, le racisme et les rapports de genre (Cervulle, 2016). Ce faisant, la pensée queer s’appuie sur les mouvements qui ont déjà préalablement bousculé les normes hétéro-patriarcales : les mouvements féministes, homosexuels et trans, anarchistes et marxistes (Tillous et Möser, 2020).
Elle permet également de questionner les identités avec la production d’espace (Henri. Lefebvre, 1974) dans un contexte politico-économique néolibéral. Michael Warner (1993) notait la dépendance des modes de vie gays et lesbiens à l’offre de lieux de sociabilité, de lieux de vie « safe » plus ou pérennes. La proposition de Michael Warner concerne une identité politique queer qui se « soulèverait contre l’économie de marché qui fut sa condition de possibilité. Il comprend la politique queer comme une résistance contre les "régimes de normalisation". » (Cervulle, 2016).
Depuis le début des années 1990, les propositions de critique et de stratégie queer portent les moyens de transgresser les limites binaires et normatives d’une société hétérosexuelle et patriarcale.
La critique queer permet ainsi d’envisager une déconstruction épistémologique et politique.
L’analyse genrée des systèmes urbains fait surgir des discontinuités autant spatiales que temporelles propres à chacun·e. Toutefois si la prise en compte du genre est de plus en plus fréquente dans les études spatiales, celles de la sexualité l’est encore fort peu comme le rappelle Rachele Borghi (2012).
D’autre part, cette proposition permet également d’étoffer une lecture spatiale intersectionnelle des rapports sociaux de domination en considérant la question sexuelle comme un rapport social normatif et hiérarchisé comme peut le faire la géographe Maria Rodo de Zarate (2015).
Mots clés : genre|sexualité|binarité|normativité|déconstruction
A103834JL