Adèle SUTRE, EHESS (ERC Lubartworld, EHESS CNRS), France
Anton PERDONCIN, EHESS (ERC Lubartworld, EHESS CNRS), France
Claire ZALC, CNRS (ERC Lubartworld, EHESS-CNRS), France
Lubartów est une ville ordinaire de la Pologne de l’entre-deux-guerres. Au début des années 1930, elle compte un peu plus de 7000 habitants, dont 45% sont juifs. En 1945, ils ne sont plus qu’une trentaine. Cette communication se propose de penser la disparition d’une communauté au sein d’une petite ville en l’espace d’une quinzaine d’années à travers l’analyse de la dynamique de ségrégation ethnique dans l'espace urbain, dans un contexte de transformation radicale des structures sociales et des conditions de vie. Nous étudierons comment les persécutions s'appuient sur et génèrent des dynamiques spatiales spécifiques, nous inscrivant en cela dans le cadre du "tournant spatial" de l'histoire de la Shoah.
Située dans une région isolée, la ville de Lubartów offre à l'enquête socio-historique une population aux réseaux denses et hiérarchisés. Cette structure spatiale et relationnelle a été bouleversée par l'invasion allemande de 1939, la guerre, les départs et arrivées de population, ainsi que la ghettoïsation, la déportation et l'extermination des Juifs. Nous nous appuierons sur des données historiques originales, notamment issues d'un registre de population, tenu à jour de 1932 à 1943. Une analyse quantitative de ces données nous permet de spatialiser, sur une décennie, les transformations de la population et de reconstituer la mobilité des individus et des familles au sein de la ville, en fonction de leurs déplacements volontaires ou forcés.
Après avoir décrit et cartographié les ségrégations ethniques au début des années 1930, nous montrerons comment elles se sont recomposées au cours d'une décennie de bouleversements majeurs. Une question centrale sera discutée : comment mesurer, à quelles échelles et avec quels outils la dynamique spatiale de la ségrégation ethnique ?
Keywords: Ségrégation|Persécutions| Shoah|Mobilité résidentielle
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