Depuis les années 2000, face à la hausse sans précédent des prix du logement à Berlin, les mobilisations de locataires se sont multipliées (Novy et Colomb 2013), parvenant à peser sur la politique néolibérale conduite par le gouvernement local. Dans cette communication, je montrerai que cette situation inédite de repolitisation de la question du logement, c’est-à-dire de redéfinition conflictuelle du problème du logement et des modes de son traitement, peut être interprétée comme étant le résultat de la confrontation entre plusieurs types d’appropriation de la ville (Ripoll et Veschambre 2005). À la métropolisation néolibérale conduite par le gouvernement local, et plus particulièrement le SPD, s’oppose en effet, par les mobilisations, certaines « territorialités » qui prennent leurs racines dans des phénomènes sociaux, politiques et culturels anciens et ancrés, ou plus précisément dont l’ancienneté a permis l’ancrage (Chivallon 1999; Arnauld de Sartre et Gagnol 2012). Je distinguerai deux territorialités qui se retrouvent activées dans les mobilisations de locataires et dans la repolitisation de la question du logement à Berlin, correspondant à des modes d’appropriation de la métropole, de sa mise en sens et de son attachement à certains types de pratiques et de qualités qui ont émergé et se sont consolidés pendant la guerre froide : d’une part, un attachement à une métropole inclusive, dont les conditions de logement doivent être accessibles aux plus modestes – et qui assurent ainsi ce que Henri Lefebvre a nommé un « droit à la ville » ; d’autre part, la diffusion d’une conception oppositionnelle de la participation civique qui se manifeste dans les campagnes de référendum d’initiative populaire, dans les multiples formes d’auto-organisation informelle, et même dans les institutions et les partis en entrant en contradiction avec le dirigisme néolibéral.
Keywords: territorialité|mobilisations|berlin|politisation|logement
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